« Le compte à rebours est officiellement lancé ! » s’exclament les membres du collectif la Clef Revival, tout juste revenu·es de l’étude notariale où a été signé le compromis de vente du cinéma La Clef au fond de dotation Cinéma Revival ce matin. Bientôt la remise des clefs ?
Un tout petit peu plus d’un an après l’expulsion (que nous racontions dans le quatrième épisode de notre série d’articles sur les péripéties du dernier cinéma associatif de Paris), c’est un authentique pied de nez au destin et à la spéculation immobilière que les ex-occupant·es racontaient ce matin à la presse réunie dans la salle 3 du Reflet Médicis. Depuis la funeste journée du 1er mars 2022 et le coup de théâtre qu’a constitué le retrait du Groupe SOS, alias l’ogre de l’entreprenariat social et solidaire et acquéreur pressenti quelques heures à peine après l’expulsion, le dialogue s’est renoué entre le collectif et le propriétaire.
Autre rebondissement : ce dernier a consenti à métamorphoser d’un coup de baguette magique les 4,6 millions d’euros demandés lors de la mise sur le marché du cinéma en 2,9 millions, preuve s’il en fallait, souligne un·e orateurice, que spéculation immobilière il y avait.
Une partie du poids de la pression capitaliste envolée de leurs épaules, les membres de La Clef Revival ont ainsi pu s’engager de plus belle dans l’aventure de la constitution du fameux fond de dotation Cinéma Revival (dont nous décrivions le fonctionnement dans l’épisode cinq), et surtout, du magot : 3,1 millions en comptant les frais de notaire.
Ce matin, après la projection d’un message vidéo de Martin Scorsese lui-même, louant les vertus de la salle de cinéma, du bruit du projecteur et de l’existence d’un endroit comme La Clef, la conférence de presse s’est entièrement déroulée au futur proche. À la présentation des activités nouvelles ou de la reprise du Studio 34, des projections quotidiennes et des ateliers, a succédé la description des transformations à venir, avec l’aide du cabinet d’architecture. Ce futur lieu de vie ouvert et accessible au cœur d’un cinquième arrondissement de plus en plus onéreux, mêlant café associatif, espaces de montage, bibliothèque militante n’a jamais paru aussi tangible.
La Clef rêvée, l’utopie concrète, solidaire, soustraite au marché est à portée de main, semblaient nous dire les membres du collectif (même le CNC est d’accord pour ouvrir ses modes de calcul aux tickets à prix libre !). Il reste toutefois un bout de chemin significatif à parcourir d’ici le 26 octobre, date à laquelle la totalité de la somme devra être réunie – soit 200 000 euros de financement participatif et 400 000 euros de mécénat. La rumeur prétend qu’un riche cinéaste new-yorkais pour qui le monde de la spéculation n’a plus aucun secret pourrait lui aussi rejoindre les rangs des donateurices. À suivre…
Il n’en demeure pas moins que, par les temps qui courent, apprendre qu’un bien commun “issu des expérimentations de Notre-Dame-des-Landes, de la foncière Antidote, du Clip et du cinéma Nova de Bruxelles” pourrait bientôt éclore en plein cœur de Paris, a de quoi réchauffer le cœur aussi bien si ce n’est mieux qu’un feu de poubelle.
Plus que jamais, donc, la plateforme de dons est ouverte et les oncles et tantes d’Amérique sont les bienvenu·es.