Télévision et exercice démocratique

Des paroles et des actes - 23 Février 2012

par ,
le 27 février 2012

Des petites phrases. Des grandes (à ne pas confondre avec les longues). De la langue de bois. Des lapsus. Des questions. Des réponses. Des réactions. Les émissions politiques donnent aux femmes et hommes politiques des temps de parole. Mystère : on n’entend pas parler de temps d’image. Pourtant c’est d’abord de ça qu’il s’agit à la télévision, l’écran noir étant mal vu. Ça crève les yeux, me dîtes-vous ? Alors demandons-nous un peu quelle(s) image(s) la télévision donne de la politique. Intéressons-nous aux dispositifs mis en place par les équipes de réalisation, et aux constructions qui en découlent. Voyons Des paroles et des actes par exemple : un zoom et des écrans intégrés au plateau, sur lesquels sont diffusées images fixes ou mouvantes, peuvent devenir des éléments significatifs. A travers ces éléments et quelques autres, réfléchissons au rapport qui semble s’établir entre ceux qui se trouvent devant la télévision et ceux qui se trouvent “dans” la télévision. Croisons yeux et oreilles, questionnement formel et questionnement civique. Regardons une émission politique.

«Car la démocratie, même donnée en spectacle, même devenue un show, c’est aussi une esthétique» [11] [11] Serge Daney, Le salaire du zappeur, Paris, POL, 1993, p 27

DPDA-2.jpg

Le 23 Février 2012, Marine Le Pen était l’invitée de l’émission Des Paroles et des actes, à 20h35 sur France 2. Le spectacle a un clou : Jean-Luc Mélenchon pénètre sur le plateau et prend place face à MLP. Après 24 minutes, il repart. L’émission continue, et notre attention, après les instants de tension que nous avons traversés, se relâche. Nous sommes déjà en train de nous demander qui des deux candidats à l’élection présidentielle sort gagnant de cette rencontre. Mais, étant donné que MLP a refusé le débat, que l’échange n’a pas pu avoir lieu au niveau des idées, où faut-il chercher la réponse ? Dans les paroles ? Dans les attitudes corporelles, le « jeu » de l’un et de l’autre ? Et, au fait, d’où nous vient cette question de la victoire ? On sait que le but avoué de ce genre d’émission est de permettre au téléspectateur-citoyen de se faire une opinion en le mettant en contact avec ceux entre lesquels il va devoir choisir. Mais le schéma de la désignation d’un vainqueur ne tend-il pas à ravaler la politique à une affaire de personnalités ? De quelle manière, au moment où l’on s’érige en juge, ce pouvoir de juger une personne entre-t-il en rapport avec celui de juger des idées qu’elle exprime ? Est-ce qu’il y a là compétences complémentaires ou rapport d’exclusion ?

Peut-être, une fois plongé dans ces questions troubles, faut-il revenir à la surface. Celle du téléviseur. Avant de se demander qui a gagné, commençons par nous demander ce que nous avons vu. Des paroles et des actes est-elle une émission régie par d’autres lois que celles explicitement formulées ? Que dire par exemple de ce zoom avant sur le visage de MLP s’adressant à Pujadas [22] [22] 22min53 : http://www.youtube.com/watch?v=wsxnmPa39yU&feature=related ? Ce n’est pas le seul zoom de l’émission, il y en a eu, quelques secondes auparavant, un léger sur un JLM souriant. Mais ce zoom sur MLP prend une valeur singulière ; par un curieux effet du hasard, son déclenchement concorde avec une phrase brève et incisive de JLM. Cette concordance sort le zoom de sa valeur commune, qui serait, en dehors de la simple valeur de mouvement, de permettre un rapport de contact entre le téléspectateur et le filmé – avec l’idée que le toucher, la proximité, serait la voie vers une certaine vérité du locuteur. Ici, joint à la phrase de JLM (qui a moins de valeur par son contenu que par son ton, par la volonté de maintenir une pression), il se gonfle d’une dimension dramatique. D’où vient-il au juste ce zoom ? Le caméra-man en est-il la véritable origine ? N’est-ce pas plutôt JLM ? Ou nous-mêmes ? Ou alors ne vient-il pas de l’intérieur même de MLP, qui réaliserait qu’elle perd la face parce que son visage est en ce moment exposé sur nos écrans ?

Des paroles, des actes, mais avant tout des images

Il se peut que ces réflexions paraissent démesurées au regard des quelques secondes qu’occupe ce zoom. Mais elles ont le mérite de porter l’attention sur cette évidence apparemment trop évidente pour qu’elle fasse l’objet d’une discussion : Des paroles et des actes se compose d’images. Vérité refoulée d’une émission qui compte notamment sur l’affichage des temps de parole et de son « en direct » pour nous suggérer que la part de médiation est quasiment nulle, tandis que la déontologie atteindrait son paroxysme. Le défi explicite de l’émission étant d’établir un contact direct entre citoyens et candidats, les intermédiaires sont gênants. Il faudrait que l’image soit perçue comme pure transmission, et que leurs qualités de représentants, la préoccupation qu’ils ont de poser les questions qui “préoccupent les Français”, légitiment les intervenants divers. Ces visées apparemment louables produisent à l’arrivée le contraire des effets souhaités : la croyance en la possibilité d’une transmission pure, d’une vision directe, empêche toute utilisation mesurée et constructive des images, tandis que le souci de représentation se concrétise par l’impossibilité, pour ceux prétendument représentés, d’occuper un rôle actif.

Qu’est-ce qui donne sa raison d’être à l’émission ? La pensée qu’à l’approche des élections, le téléspectateur a besoin d’une information – de connaître les candidats et leurs programmes, de savoir qui pense quoi. Cette idée pourrait symboliser la relation du journaliste au public : un rapport de supposition qui, en permettant l’économie d’un contact réel, autorise la bonne conscience. Le journaliste qui se charge aussi bien des questions que des réponses, point de départ et d’arrivée, peut symboliquement mettre le tout au compte du public. Pujadas ne fait vraisemblablement pas cette émission pour lui mais pour nous, pour le service public, pour être utile. Mais d’où émane l’idée d’une telle émission ? Du public réel ou d’un public fantasmé ?[33] [33] On pourrait très bien dire que l’émission répond avant tout à un besoin du journaliste de répondre au besoin qu’il suppose chez le public – un public sans besoin n’est pas envisageable car le journaliste lui serait inutile et il serait inutile au journaliste. Il est compréhensible que le journaliste aura tendance à supposer un besoin auquel apporter une réponse ne devra pas poser trop de problèmes. Le besoin du public ainsi conçu vient toujours se glisser dans une réponse pré-établie, et lui servir d’alibi. On pourrait alors caractériser le rapport du journaliste au public par la formule suivante : “Je fais ce dont le public a besoin / Le public a besoin de ce que je fais” Tout se passe donc sur le mode du « nous nous adressons à vous », mais avec en plus, implicitement, « nous sommes à la télé et vous êtes devant », dans un système à la fois hiérarchisé et consensuel où on ne peut pas accepter la séparation sans jouer sur le contact.

Mais qu’aurions-nous voulu ? Ne sommes-nous pas un peu innocents en désirant qu’une émission politique d’avant élection invente un dispositif particulier ? Se mettre à réfléchir sur un dispositif aurait signifié avoir un regard critique sur ce qui se fait ou a été fait. Or, Des paroles et des actes étant menée par un personnel “maison” de France 2, bien installé dans ses murs, la critique, automatiquement, aurait été une auto-critique. Ne serait-il pas étrange que le présentateur du journal de 20h remette en cause les schémas d’information pratiqués quotidiennement ? Mais ce ne seront ni la psychologie, ni même la sociologie, qui nous affermiront dans ces idées, c’est le dispositif mis en place par l’émission. Il apparait clairement comme un dispositif fait par la télévision pour la télévision.

Le monde et le plateau : des écrans dans l’écran

Il faut d’abord rectifier ce qui est écrit plus haut. Le plateau, truffé d’écrans, montre que ceux qui font l’émission savent que la télévision est une affaire d’images. Il y a, derrière le public, deux petits écrans (pour le décompte du temps de paroles, le titre de l’émission…) et deux grands écrans, plus, au milieu du plateau, une table-écran (elle sépare les intervenants), et le sol lui-même peut à l’occasion faire office de grand écran. Sur les quatre grands écrans ainsi disposés peuvent venir s’afficher des images fixes ou mouvantes. Il ne semble pas y avoir de règle mais plutôt des tendances. Les deux écrans situés en hauteur et celui au sol servent plutôt à afficher des images fixes illustrant la conversation en cours, tandis que celui de la table diffuse plutôt des images prises en direct par une caméra sur le plateau (on peut ainsi avoir deux points de vue « directs » dans le même plan). Ce dispositif relève d’abord d’une logique du remplissage. Il faut multiplier les images dans l’image, les attractions visuelles, pour nourrir l’œil du spectateur. Suivant la même logique, il sera recommandé de ne pas faire durer les plans trop longtemps, pour ne pas risquer l’ennui. Dans une émission où l’action réside moins dans les actes que dans la parole, cela signifie privilégier le changement au sens, l’œil à l’oreille. Mais le sens s’intègre toutefois au désintérêt qu’on lui porte ; en passant d’une caméra à une autre, il arrive que l’image nous donne quelques informations. Un plan sur celui qui écoute et sur sa réaction ne peut pas ne pas influencer notre propre réception. C’est alors sur le décalage entre l’intention de la réalisation et l’effet qu’elle produit qu’il faudrait réfléchir.

Les images fixes, pour leur part, semblent obéir à une logique du logo. Un radar apparaît lorsqu’on évoque le permis à point ; deux soldats au moment où l’on aborde l’éventuel rétablissement du service militaire, etc. Leur fonction serait donc d’ancrer les paroles dans le visible, tout en faisant passer l’extérieur à l’intérieur – invocation du monde par le plateau. Mais la logique à laquelle obéissent ces images censées ouvrir le plateau est encore une logique intégralement télévisuelle. Il n’y a peut-être pas grand-chose à dire sur les images d’éoliennes montrées au moment où l’on parle d’une possible sortie du nucléaire (ou on pourrait justement dire qu’étant donné qu’il n’y a rien à en dire, ces images sont nulles), mais celles choisies pour illustrer un sujet comme l’immigration peuvent interpeller [44] [44] De 16min à 18min pour les trois images dont il est question dans la fin du paragraphe : http://www.youtube.com/watch?v=SCAJQMc1rfw&feature=related . Nous voyons d’abord la photo d’un homme penché sur une table, la tête cachée par ses bras tendus sur un sac contenant certainement tout ce qu’il possède. Puis, sur le deuxième écran, vient s’insérer la photo d’un avion sur la passerelle duquel quelques immigrés étaient en train d’avancer, prêts à être « reconduits ». Et, enfin, la première photo est remplacée par une autre, où l’on voit une petite foule devant une préfecture – attendant certainement pour des papiers, se dit-on.

À voir l’immigration en trois images, on se rend alors compte que, s’il y a un ancrage de la parole dans le visible, il ne nous est donné à voir que des clichés. Alors même que le débat politique devrait procéder d’une mise en jeu, en contexte ou en perspective, des idées reçues, le voilà illustré par des images se situant aux antipodes d’une démarche problématique. Ces images attestent de la reconnaissance d’un problème, mais la représentation du problème semble n’en poser aucun. Le monde extérieur se fige en quelques images-logos se remplaçant les unes les autres sans que le moindre rapport de sens soit créé entre elles – ce qui laisserait éventuellement entrevoir un peu de complexité. Venant en arrière-plan, elles se proposent comme fond commun. Toutes les idées ne s’expriment alors que sur ce fond indiscutable. Ceci est d’autant plus le cas que ces images semblent n’être attribuables à personne alors même qu’elles s’adressent à tous. On sait bien attribuer les paroles à des sources physiques, on sait alors que les paroles ont à voir avec l’expression d’une opinion, un rapport subjectif et secondaire au monde. Mais ces “fonds d’écran” constituent un rapport primaire au monde – « c’est un des caractères du monde de n’être proféré par personne », écrivait Christian Metz -, et c’est aussi le caractère que le dispositif voudrait donner à ces images. Elles apparaissent comme le monde sans opinion, le monde pour tous. Seulement, c’est bien sur des écrans qu’elles apparaissent. Et par ces écrans, ce n’est pas le monde extérieur qui s’introduit sur le plateau, c’est le plateau qui retransmet dans le monde la vision qu’il s’en fait. Vision conditionnée et formatée où le visible renvoie à l’évidence. C’est dans un tel système qu’il ne fait pas de doute que le drapeau tricolore entretient un rapport ontologique avec la France.

La dramaturgie politique : “le duel”

Il arrive également des images fixes qu’elles représentent des têtes connues, selon la même logique d’illustration de la conversation, mais avec des effets différents. Par exemple, lorsqu’on interroge MLP sur la question du nucléaire iranien, nous voyons apparaître la tête d’Obama sur un écran, puis celle d’Ahmadinejad sur un autre [55] [55] 12min55 : http://www.youtube.com/watch?v=SCAJQMc1rfw&feature=related . En parallèle du double problème de représentation que cela pose (un Etat représenté par son dirigeant – le problème du nucléaire iranien représenté par un face-à-face), ces images s’intègrent à une certaine conception dramatique de la politique. La politique y est faite de confrontation entre personnalités. A l’opposition des idées, trop abstraite, qui demande du temps, on préfère l’opposition des corps et des paroles, de la rhétorique. L’accord de cette conception avec la télévision, qui est avant tout une surface d’exposition, est prégnant. Ainsi la rencontre des présidents américains et iraniens, même si ce n’est qu’une rencontre d’images, cadre avec ce schéma dramatique.

Nous les voyons en gros plans et nous nous demandons, comme s’il s’agissait de personnages de fiction, qui sortirait vainqueur d’une rencontre. Il s’instille une forme de tension, assez ambigüe, dans ce face-à-face imagé. En effet, nous sommes doublement sollicités – en tant que spectateur et en tant que citoyens, et le fait que nous sachions que ces images ont des référents actuels et renvoient à une situation réelle ne joue pas peu dans la tension. Mais cette représentation du nucléaire iranien peut aussi nous fournir le premier des termes qui nous permettra une mise en cause pratique du dispositif de l’émission. Le deuxième terme sera la présentation de la rencontre entre MLP et JLM comme un « duel ». Le mot s’affiche sur les écrans, et cette fois l’affichage ne renvoie donc plus à une image prélevée dans le monde, mais à une intention éditoriale. On aurait certes pu dès le départ assigner une source à ces images d’écrans, mais on pouvait aussi distinguer les images du monde et les images « éditoriales » ; le partage de support n’est pas forcément un partage de source. Seulement la figure du duel crée un rapport image-écran-plateau qui autorise l’idée d’une unification de la source. Le duel organisé en images est suivi d’un duel en plateau – on peut penser a posteriori que, tout comme le duel de plateau répond à une intention (JLM et MLP ont été invités), le premier aussi (les gros plan ont été l’objet d’une décision). C’est donc finalement le dispositif lui-même, oscillant maladroitement entre volonté de mise en rapport directe avec le monde et volonté spectaculaire, qui fait apparaitre ce qu’il semble vouloir masquer : la conformation des images et des événements à une visée télévisuelle.

Le devenir-logo de l’homme politique

Cette conformation pourrait encore avoir une autre dimension, la plus dommageable pour la politique. Car, s’il est évident que les images fixes sont pour les journalistes des outils malléables, il est plus surprenant de se dire que ceux qui sont présents, ceux qui animent les images mouvantes ont, sous le mouvement apparent, une étonnante fixité, et entrent en parfaite coalescence avec les logiques télévisuelles. L’évidence qui voudrait qu’on ne compare pas le duel d’images fixes Obama-Ahmadinejad et le duel « réel » MLP-JLM tient-elle véritablement ? Qu’est-ce qui, pour le téléspectateur, distingue ces images fixes des images mouvantes qu’il voit « en direct » à la télévision ? Qu’est-ce qui distingue les personnes en chair et en os des logos ? Ne sont-ils pas eux-mêmes figés, en lutte avec leur adversaire mais aussi avec leur conscience d’être une image ? Etait-il vraiment nécessaire de voir Henri Guaino discuter avec MLP, quand il s’agissait pour chacun d’affirmer les idées qu’on lui connait, qui sont aussi les idées de son parti ?

L’intérêt et le plaisir que l’on prend à ce genre de débat tient moins à sa valeur informative qu’à son côté feuilletonnesque – on y retrouve des personnages familiers, qu’on aime aimer ou haïr, pour lesquels il s’agit de se plier à des codes, à des rôles. On n’y cherche pas de nouveauté, mais on est curieux de voir comment untel évolue, d’assister à une rencontre inédite entre des personnes qu’on a jusqu’à présent seulement vues dans des espaces séparés. A l’évidence des images-clichés répond l’évidence des positions politiques et des invités. Le système des partis semble à ce niveau fait pour la télévision – être membre d’un parti, se reconnaître dans son discours, dans ses valeurs, c’est du même coup être reconnaissable et reconnu, faire partie du spectacle, s’inscrire dans un devenir-logo. Réunis sur un plateau de télévision, les membres de partis opposés deviennent les acteurs d’un spectacle où leur opposition finit par prendre des airs de complicité. MLP peut bien s’en prendre à Pujadas et dénoncer la politique-spectacle, la dénonciation est toujours un moment appréciable du spectacle. JLM peut bien mettre MLP en difficulté, il reste pris dans la fidélité à un rôle qu’on lui a assigné.

C’est la télévision qui domine. C’est elle qui fixe les règles du jeu. Et même le clou du spectacle, le « duel », n’est qu’un élément pris dans un flux télévisuel plus large, vite remis à sa place. Il est évident que l’émission politique ne peut pas durer toute la nuit, car il faut ensuite passer l’émission Avant-premières où Line Renaud nous confiera que pour elle, l’identité nationale c’est vivre ensemble, c’est l’amour, ce qui ne manquera pas de provoquer une salve d’applaudissements. L’émission politique elle-même est construite comme un enchaînement de séquences. On passe de la discussion Le Pen-Guaino à un moment « pure politique » (ce qui laisse songeur sur le reste…), puis au « duel », puis à l’intervention de deux « experts » (Helène Jouan et Franz-Olivier Giesbert). Mais il y a toujours un moment de chevauchement, des images d’annonce qui participent encore d’une dramatisation. Des images de Mélenchon dans les coulisses [66] [66] 18min06 : http://www.youtube.com/watch?v=SCAJQMc1rfw&feature=related qui nous permettent de jouir de l’affrontement par anticipation. Mais aussi, à la fin du « duel », un plan surprenant où la caméra se tient au niveau d’une table, et où l’on voit des mains tenant des fiches. Image où, malgré le cadre hasardeux qui place un verre en son centre, nous sommes supposés comprendre que l’homme aux fiches est le prochain intervenant – « l’émission se poursuit » [77] [77] 23min16 : http://www.youtube.com/watch?v=wsxnmPa39yU&feature=related . Les invités de l’émission sont pris dans cette structure qui les dépasse, tout candidats à la présidentielle qu’ils soient. Le principe de Des paroles et des actes est de consacrer chaque émission à un invité particulier. MLP dira à JLM « c’est mon émission ». Candeur. L’émission est avant tout l’émission de la télévision. On peut bien se demander si JLM a gagné, mais il faut alors nous demander si ce n’est pas troquer sa position de citoyen contre celle de spectateur-arbitre. [88] [88] “Le peuple est devenu public” écrivait Baudrillard dans À l’ombre des majorités silencieuses

Passage obligé des hommes politiques, la télévision les donne en spectacle. La télévision fonctionnera toujours avec des images, mais il nous appartient de choisir les images que nous jugeons dignes de nous. Si elle veut être un instrument démocratique crédible, elle doit profondément réfléchir sur ses dispositifs, les présupposés qui les animent, ainsi que la place qu’ils donnent au téléspectateur et au lien qu’ils produisent entre celui-ci et le monde. Mais cette exigence pourra difficilement être produite par la télévision elle-même. Le respect n’est donné qu’à ceux qui l’exigent. Un public-logo était présent sur le plateau, comme dans n’importe quelle émission ou jeu télévisé. Il sera peut-être bon que ce public se lève pour aller voter le jour de l’élection, mais il aurait peut-être été bon qu’il se lève ce jeudi soir et quitte le plateau. Nous aurions pu nous apercevoir plus rapidement de ce que nous regardions : la télévision, et rien que la télévision.