L’expression le dit assez : la “capture d’écran”, pratique récente qui ajoute à l’arrêt sur image du magnétoscope la possibilité de la conservation et de l’indexation, est une forme de prédation : le spectateur n’hésitera guère à interrompre le flux filmique pour se saisir d’une image, une seule, en l’arrachant au défilement sans lequel elle n’existerait pourtant pas. Quelle est la valeur d’une telle image, au regard du film ? Peut-être d’abord celle de note, de trait de crayon dans la marge. Elle supplée à notre mémoire défaillante. Et, aussi bien, la constitue. Le cinéphile trouvera dans ces lambeaux arrachés à la chair des films de quoi satisfaire son goût du fétiche et de la collection. Mais si le doigt (qui capture) s’associe si bien à l’œil (qui frémit), c’est que le spectateur est toujours aussi en train d’associer, de monter : c’est cela même qui lui permet de saisir dans l’instant une image plutôt qu’une autre : un écho, un rapport, une persistance ou un accroc. Il est donc fatal que ce qui est dissocié se retrouve associé. La capture, si elle arrête le film, ne le fait qu’au nom d’un autre mouvement, celui qui en chacun se constitue entre les films. Ainsi commence l’histoire.
Ces notes n’ont d’autre prétention que de mettre au jour quelques motifs et de les lier entre eux. Chacun (la main et le film, l’écran qui regarde, la chair des images,…) devra faire l’objet d’un travail indépendant.
Voici “Notes pour une histoire du cinéma“.